Pour une Journée fédérale de solidarité et d’hommages

 

Le lundi 21 septembre prochain pourrait être celui de la cohésion sociale, s’agissant d’inscrire symboliquement l'importance de l'épreuve collective qui a été vécue par la population ces derniers mois de crise liée au COVID-19. Cette date serait également l'occasion d'accompagner les familles dans leur long travail du deuil, tout en saluant officiellement le courage dont elles ont fait preuve.

Alors que la grande majorité des pays européens ont entamé leur processus de déconfinement, que les frontières s'ouvrent et que nous avons lancé à Genève une grande campagne de sensibilisation pour co-vivre avec le virus, nous ne devons pas oublier la douleur de celles et ceux qui ont perdu un être cher récemment, en raison de la pandémie ou pas. Selon les statistiques de la Confédération, le bilan du coronavirus à Genève s'élève à 259 décès, pour 1677 décès dans toute la Suisse et 418 294 dans le monde. A cela, il faut ajouter les décès relatifs à d'autres causes et maladies qui viennent augmenter le nombre de disparitions survenues en période de confinement. 

Comme je l'avais écrit dans une opinion du Temps parue le 12 mai dernier, les institutions doivent comprendre l'importance fondamentale d'accompagner les familles dans le douloureux travail du deuil. Ce processus, qui fait partie intégrante de la vie, est également nécessaire à la reconstruction de tout un chacun, car il s'avère indispensable pour continuer à vivre sereinement. Cet accompagnement est d'autant plus important pour soutenir les familles qui ont vécu ce traumatisme de ne pas pouvoir accompagner une personne sur le départ, en période de confinement.

Dimension sociale de l’Etat

A cet égard, le poison de la culpabilité peut avoir des conséquences délétères et inattendues sur une longue chaîne de générations qui en porteraient inconsciemment le poids. Cette démarche est donc primordiale, pour éviter que des séquelles psychologiques n'aient un impact important sur l'ensemble de la société. 

L'occasion de cette tribune libre, j'avais également rappelé le rôle que l'Etat se devait de tenir, dans sa dimension sociale, en proposant à la population, au sortir du confinement, des espaces pour organiser des cérémonies d'adieu aux défunts, permettant de réunir les proches n'ayant pas pu le faire précédemment et en offrant, s'il y avait lieu, un soutien psychologique à toutes et tous les Genevois-es ayant enterré l'un-e des leurs pendant la crise du COVID-19. 

Pour rappel, à Genève, les mesures sanitaires en milieu para-hospitalier ont été parmi les plus strictes de Suisse. Ces mesures ont été comprises par la population, mais la souffrance des familles doit être reconnue. En effet, celles qui ont perdu l'un-e des leurs pendant la période de confinement se sont vues imposées une distanciation sociale qui ne leur a pas permis de toucher, d'entourer et d'embrasser la personne décédée. 

L’intimité, un rouage essentiel

Le rite ensuite, qu'il soit religieux ou laïc, a été strictement circonscrit au cercle familial restreint, toujours en raison des distances requises exigées par les normes sanitaires en vigueur. Les familles ont été obligées de choisir, parmi elles, qui serait présent lors de la cérémonie funéraire et les services funèbres. Les personnes choisies ont elles aussi de se tenir à distance, alors qu'en temps normal, l'intimité des rapprochements est un rouage essentiel dans l'accompagnement et le soutien aux familles.

Ainsi, de nombreuses personnes qui ont vécu un deuil pendant cette période ont subi la double peine de la douleur intime et de l'impossibilité d'être accompagnées par un cercle plus large de proches, Berne ayant dans les premières mesures de la crise, et pour des raisons légitimes, interdit les rassemblements de plus de cinq personnes. Genève devrait, et de manière tout aussi justifiée, faire en sorte que la collectivité dans son ensemble puisse dire adieu aux personnes décédées afin que la perte d'êtres chers puisse être intégrée et acceptée. 

Au-delà des drames intimes vécus par des particuliers, il apparaît aujourd'hui important que l'ensemble de la société puisse exprimer une solidarité avec toutes celles et tous ceux qui ont été confronté-e-s au deuil pendant cette période de pandémie. Le faire lors d'une Journée fédérale de solidarité et d'hommages, qui aurait par exemple lieu le Lundi du Jeûne fédéral, soit le lundi 21 septembre prochain, renforcerait la cohésion sociale au sein de notre société, inscrirait symboliquement l'importance de l'épreuve collective qui a été vécue par la population et serait l'occasion d'accompagner les familles dans leur long travail du deuil, tout en saluant officiellement le courage dont elles ont fait preuve.

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